Adnan Syed, 42 ans, avait été condamné à la réclusion à perpétuité en 2000 pour le meurtre de son ancienne petite amie Hae Min Lee à Baltimore, sur la côte est des Etats-Unis. Dans un revirement inattendu, la procureure de la ville, Marilyn Mosby, avait déposé la semaine dernière une requête en annulation de ce verdict, en expliquant avoir des doutes sur la culpabilité d’Adnan Syed, et avait demandé sa remise en liberté. Elle avait expliqué avoir découvert l’existence de « deux suspects alternatifs », une information cruciale mal exploitée à l’époque et qui, surtout, n’avait pas été communiquée à la défense avant le procès.
Lundi, une magistrate a donc validé la demande de la procureure, lors d’une audience dans une salle bondée d’un tribunal de Baltimore. « Dans l’intérêt de la justice et de l’équité, la motion est acceptée et l’accusé va être libéré » et équipé d’un bracelet électronique, a déclaré la juge Melissa Phinn. Des agents ont alors retiré les entraves d’Adnan Syed, tandis qu’une partie de la salle applaudissait avant d’être rappelée à l’ordre. La barbe fournie, et la tête couverte d’un calot, il n’a pas manifesté de réaction.
La procureure Marilyn Mosby a, elle, insisté, sur le fait que la justice n’avait « pas encore déclaré Adnan Syed innocent » et qu’elle attendrait les résultats d’analyse ADN complémentaires avant de décider d’abandonner les poursuites contre lui ou d’organiser un nouveau procès.
Elle a 30 jours pour le faire. Quelle que soit sa décision, elle a promis de continuer l’enquête « pour assurer que la famille de Hae Min Lee connaisse avec certitude le coupable ».
L’affaire avait débuté en février 1999, quand la police avait retrouvé le corps de Hae Min Lee, 18 ans, à demi-enseveli dans un bois de Baltimore. Arrêté à l’âge de 17 ans, Adnan Syed avait été condamné à la prison à vie un an plus tard. Selon l’accusation, il n’avait pas supporté qu’elle le quitte pour un autre et l’avait étranglée. Lui a toujours clamé son innocence, se disant victime de préjugés anti-musulmans.
L’enquête des journalistes de « Serial » avait montré que l’avocate d’Adnan Syed avait négligé une expertise de téléphonie mobile favorable à l’accusé, ainsi que le témoignage d’une jeune fille qui lui offrait un alibi potentiel.
Leur travail avait entraîné une réouverture du dossier et, en mars 2018, une cour d’appel du Maryland avait ordonné un nouveau procès, estimant que l’avocate avait apporté une « aide inefficace » à son client.
En mars 2019, la Cour suprême du Maryland avait reconnu que l’avocate avait eu tort de ne pas présenter certains éléments, mais elle avait estimé qu’ » étant donné la totalité des preuves », le verdict n’aurait pas été différent si elle les avait inclus. Elle avait donc refusé l’organisation d’un nouveau procès.
La défense d’Adnan Syed s’était alors tournée vers la Cour suprême des Etats-Unis. En 2019, celle-ci avait refusé d’intervenir, ce qui avait semblé mettre un terme à ses espoirs de libération. Mais la procureure de Baltimore, qui dispose d’un service dédié à la correction des erreurs judiciaires, a rouvert une nouvelle fois le dossier, provoquant finalement ce dernier renversement judiciaire.
Un nouvel épisode de Serial sera diffusé mardi matin, a annoncé lundi le podcast sur son compte Twitter.